Volet Alternatif Nature de l'École Charles-Lemoyne 3.65

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2001 rue Mullins
Montreal, QC H3K 1N9
Canada

About Volet Alternatif Nature de l'École Charles-Lemoyne

Volet Alternatif Nature de l'École Charles-Lemoyne Volet Alternatif Nature de l'École Charles-Lemoyne is a well known place listed as Education in Montreal , Elementary School in Montreal , Public School in Montreal ,

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Le texte fondateur
"Pour une école alternative à Pointe St-Charles"

Table des matières
État des lieux
Le modèle alternatif
Les objectifs avoués
a) Une implication maximale des parents
b) Une implication maximale du milieu
c) Une implication maximale des enfants
Les incontournables
a) Le système de valeurs
b) Les orientations pédagogiques
En conclusion…

Ce n'est pas qu’une belle légende. Pointe-Saint-Charles est un quartier où se pratique réellement une culture d'engagement et d'initiatives. Depuis belle lurette, à Pointe-Saint-Charles, les familles et la communauté se sont impliquées et mobilisées pour que les écoles du quartier répondent à leurs besoins : des comités de parents sont actifs dans les écoles; le milieu communautaire est mobilisé à travers la Table de concertation jeunesse; les parents de l'école anglophone Saint-Gabriel ont empêché 4 fois en 8 ans la fermeture de leur établissement; dans les années ’90, un comité « cour d’école » s’est mobilisé pour que l’école primaire Charles-Lemoyne soit dotée d’une véritable cour de récréation…

C’est dans ce même esprit qu’aujourd’hui, en 2012, nous présentons un projet d'école alternative axée sur la nature – projet qui se veut novateur, inclusif et complémentaire aux ressources et aux forces de notre milieu.

État des lieux

Pointe-Saint-Charles est un quartier dont la population est, en grande partie, socio-économiquement défavorisée et, de ce fait, les défis posés au milieu scolaire sont importants. Les écoles publiques concentrent « une proportion importante d'élèves issus de familles défavorisées et donc plus susceptibles de présenter des difficultés d'apprentissage » . En 2008, les trois écoles primaires de Pointe-Saint-Charles se situaient toutes parmi les 25 plus défavorisées des 334 de l'île de Montréal.
Pour cette raison, et à juste titre, les écoles primaires du quartier (Jeanne-LeBer et Charles-Lemoyne) ont tout mis en œuvre afin que des élèves provenant de milieux fragiles réussissent avec succès leur parcours scolaire : travailleurs sociaux, psychoéducateurs, orthopédagogues… Tous sont à pied d’œuvre afin de faire de ces écoles des milieux aptes à encadrer efficacement des enfants souvent aux prises avec de multiples problèmes d’intégration au monde scolaire.
Or le quartier est actuellement en mutation. Traditionnellement occupé par une population irlandaise et canadienne-française ouvrière, ensuite appauvri et délaissé au cours d’une longue crise de désindustrialisation, le quartier est, depuis une vingtaine d'années, soumis à deux grandes transformations sociales : l'embourgeoisement et une immigration d'origine diversifiée.

Ainsi, depuis une dizaines d’années, de nouvelles familles se sont installées à Pointe-Saint-Charles : ce sont, pour nombre d’entre elles, des familles de la classe moyenne. Plusieurs de ces « nouveaux arrivants » connaissent bien le milieu dans lequel ils arrivent, participent à la vie communautaire et apprécient cette mixité des classes sociales qui fait la particularité et la richesse de ce quartier. Généralement, l'apport de ces nouveaux citoyens se fait en relative harmonie avec la population traditionnelle, notamment grâce à la force communautaire qui agit comme vecteur de la vie sociale et permet d’entretenir l'esprit de village du quartier.

Par ailleurs, l'arrivée de plusieurs nouvelles communautés ethniques à Pointe-Saint-Charles est en voie de modifier le portrait du quartier : en 2006, près de 20 % de la population du quartier était issue de l’immigration et, quoique cette proportion soit moins forte que dans l’ensemble de Montréal (où elle se situait à 31 %), reste qu’elle a transformé radicalement le paysage de Pointe-Saint-Charles. Cette importante partie de la population provient d’une vague d’immigration récente (les deux-tiers de ces nouveaux arrivants étant au pays depuis moins de 15 ans), et elle est majoritairement originaire d’Afrique, d’Asie et du Moyen-Orient . Son arrivée pose des défis d’accueil, d’intégration et d’adaptation que doivent relever les écoles du quartier, mais aussi les résidents qui se trouvent confrontés au quotidien à des modèles socioculturels différents.

Ces transformations majeures des données démographiques de notre milieu ne peuvent pas ne pas avoir d’impact sur les pratiques scolaires, car qui dit population diversifiée dit demandes nouvelles, attentes inédites, schémas d’intégration à réinventer… Ainsi, plusieurs des familles nouvellement arrivées souhaiteraient, parce qu’elle s’arrime à leurs valeurs et parce qu’elle permet une façon différente de concevoir le rapport entre la famille et l’école, l’arrivée d’une école alternative dans le quartier. Ces familles, parce qu’elles ne trouvent pas actuellement le modèle de scolarisation qui correspond à leurs attentes, font en grand nombre le choix d’inscrire leurs enfants dans des écoles situées à l’extérieur du quartier : certains fréquentent des écoles à vocation particulière (FACE ou Le Plateau) ; d’autres se rendent matin et soir dans des écoles alternatives situées à Notre-Dame-de-Grâce ou sur le Plateau-Mont-Royal ; d’autres, enfin, quittent carrément le quartier au moment de l’entrée à la maternelle et vont, dans bien des cas, grossir les rangs des écoles de banlieue.

Ce phénomène, observable à grande échelle dans notre milieu, a aussi cours dans d’autres quartiers de la métropole où une récente gentrification a modifié en profondeur les données démographiques. En réalité, tout l’arrondissement du Sud-Ouest (Saint-Henri, Petite-Bourgogne, Ville-Émard et Côte-Saint-Paul) est actuellement aux prises avec ce type de bouleversements sociaux. Et c’est sans compter le développement imminent du Griffintown…

À l'heure où nous sommes conviés, toutes origines et classes sociales confondues, à une nouvelle façon d’être ensemble, nous devons repenser l'intégration scolaire dans notre communauté : l’école, que nous rêvons publique, gratuite, commune, forte de tous ses membres et de racines profondes dans notre milieu, est le terreau où ces rencontres peuvent et doivent se produire. Au panorama des ressources présentes à Pointe-Saint-Charles, nous voulons ajouter une nouvelle façon de continuer collectivement à cheminer vers cet idéal de cohésion sociale.

Vers une école alternative enracinée dans son milieu, à Pointe-Saint-Charles !

Le modèle alternatif

Dès lors, pourquoi privilégier le modèle alternatif ? D’abord parce que ce type d’école, profondément inclusif, semble le seul à même de faire cohabiter les attentes des uns et les besoins des autres. Dans un milieu aussi diversifié sur le plan socioéconomique et sur le plan culturel, il faut un modèle souple, adaptable aux réalités fort différentes de familles et d’enfants qui ont choisi de partager un même milieu de vie, un même projet, mais qui tiennent à se réaliser pleinement dans leurs différences.

Le modèle éducatif alternatif a pour objectif premier de faire cohabiter ces diverses tranches de population et de chercher des solutions appropriées à chaque enfant, à chaque famille : chercher le moyen de « raccrocher » les parents qui ont eu un parcours difficile à l’école en les intégrant au parcours scolaire de leur enfant; chercher le moyen d’intégrer des parents nouvellement arrivés qui ne maîtrisent pas encore le français, mais qui peuvent néanmoins participer pleinement à la vie de l’école; chercher le moyen d’utiliser au maximum les ressources humaines en provenance des familles plus favorisées du quartier. Cette quête permanente de solutions à des questions toujours nouvelles (transformation du milieu, modification des attentes parentales, évolution des modèles pédagogiques…) est au cœur du projet alternatif, comme il est, depuis toujours, au cœur de la vie du quartier.
Ainsi, plusieurs des « grands principes invariants qui fondent la pédagogie » des écoles alternatives semblent coller aux besoins immédiats d’un milieu fortement hétérogène:

1. L’école publique alternative constitue une communauté d’appartenance et, à ce titre, est accessible à tous les parents, à tous les enseignants et à toutes les directions qui adhèrent aux valeurs et idéaux de son projet éducatif.
2. La réussite d’un élève tient à l’atteinte de sa pleine mesure voire à son dépassement, tant à la maison qu’à l’école.
3. L’élève exploite ses différences individuelles, ses forces ou ses faiblesses, tout en contribuant à la communauté éducative qui l’entoure et le supporte.
4. L’intervention éducative des enseignants et des parents s’axe autour du projet de l’élève comme moteur de son autonomie.
5. L’intervention éducative des enseignants et des parents mise sur le goût d’apprendre et les intérêts personnels de l’élève pour qu’il devienne un apprenant à vie.
6. L’intervention éducative des enseignants et des parents prépare l’élève à jouer un rôle actif dans une société plus juste, plus solidaire et plus planétaire.
7. Parents, enseignants et élèves forment une communauté d’apprentissage dans un esprit de coéducation.
8. Les enseignants forment une équipe qui agit comme ressource et guide de l’élève dans sa formation.
9. Direction, personnel, parents et élèves cogèrent l’école comme une communauté de vie.
10. L’école publique alternative constitue une communauté de recherche et de développement formée d’élèves, d’enseignants, de parents et d’une direction.

Le fait de recentrer les apprentissages autour de l’enfant lui-même, de ses besoins, de ses forces et de ses faiblesses semble un gage de réussite quand il s’agit de mettre en commun des enfants provenant de milieux hétérogènes. Dans le modèle alternatif, la prise en charge d’une partie des apprentissages par l’enfant lui-même et par sa famille ouvre la porte à une diversification des contenus et des formes d’apprentissage, au jour le jour, qui peut permettre de répondre efficacement aux besoins des enfants et aux attentes des familles.

Et fondamentalement, ce qui unira tout ce beau monde autour d’un même projet éducatif, ce sont les valeurs communes de partage, de respect et de tolérance qui sont à la base même du modèle alternatif. Pour réussir ce défi d’intégrer dans un même lieu de scolarisation des familles venues d’horizons aussi divers, il faut donc se recentrer autour de l’enfant. Il faut viser la réussite de chacun dans la mesure de ses propres possibilités. Il faut des parents et des enseignants œuvrant de concert afin que l’enfant développe, par sa propre réussite, le sentiment de fierté qui lui permettra de se dépasser. Il faut un milieu solidaire, soudé, passionné par les enfants. Il faut un tissu social qui puisse se resserrer autour de l’école. Il faut un quartier amoureux de lui-même et capable d’essayer, de tenter l’expérience de la différence.

Les objectifs avoués

a) Une implication maximale des parents
« Le SUJET n'est plus uniquement l'élève, mais devient l'ensemble des personnes qui apprennent, soit l'élève, les autres élèves, les enseignants, les parents et le personnel non enseignant, qui constituent à eux tous une communauté d'apprentissage. »
Dans le système scolaire alternatif, l’enfant, placé au cœur du processus d’apprentissage, devient le laboratoire de ses propres expérimentations et transmet le savoir autant qu’il le reçoit. Il peut, à ce titre, devenir un agent du changement : autour de lui se cristallisent les talents, les forces, les connaissances, l’amour aussi d’adultes qui, en retour, bénéficient des interactions qui naissent de ces contacts humains privilégiés. Les parents, invités à participer activement au processus pédagogique, intégrés à la vie même de l’école, deviennent de véritables « coéducateurs » : ils sont invités à entrer dans les classes, à participer au processus d’apprentissage des enfants et à faire profiter l’ensemble de la communauté de leurs propres forces.
Dans un milieu hétérogène comme celui qui se dessine actuellement à Pointe-Saint-Charles, ces interactions dans l’espace « neutre » de l’école ne peuvent qu’être bénéfiques non seulement à l’enfant, mais à l’ensemble de la communauté qui sortira encore plus unie et pacifiée de cette rencontre de la différence. Familles défavorisées ayant connu des expériences scolaires difficiles, familles migrantes ayant peu de contacts avec leur milieu d’accueil, familles de la classe moyenne recherchant un milieu stimulant où elles peuvent prendre part au projet éducatif de leurs enfants : tous ces sous-groupes, fortement représentés à Pointe-Saint-Charles, bénéficieront d’un modèle où adultes et enfants cohabitent et construisent ensemble le lieu de leurs apprentissages.
Par ailleurs, l’importance de l’implication parentale dans le modèle alternatif ne peut, nous semble-t-il, qu’avoir un impact majeur et positif sur les écoles primaires existantes du quartier : parce que l’école alternative de Pointe-Saint-Charles compte établir le plus de ponts possible avec les écoles et les organismes du quartier, parce que son projet éducatif se veut ouvert sur le milieu et solidaire, il y a tout lieu de croire que les énergies qui seront déployées pour assurer un cadre de vie stimulant pour les enfants de l’école alternative permettra d’encourager d’autres parents à s’approprier aussi le lieu de scolarisation de leurs enfants. Quand on sait l’importance cruciale que revêt l’implication parentale dans le processus de scolarisation des enfants, il va de soi qu’un modèle de scolarisation qui encourage au maximum cette participation parentale a de bonnes chances à la fois d’assurer la réussite des enfants de l’école alternative (c’est ce qui se constate actuellement dans le réseau des écoles alternatives du Québec), mais aussi de permettre à des familles fréquentant l’école régulière de découvrir le plaisir et la nécessité de partager l’espace scolaire avec le personnel enseignant. Dans la mesure où, au moment de l’ouverture de cette nouvelle école, il y a de bonnes chances qu’il y ait partage de locaux, d’espaces de vie, de services, voire de personnel administratif avec une école régulière du quartier (en l’occurrence l’école Charles-Lemoyne, à Pointe-Saint-Charles), il paraît d’autant plus aisé d’imaginer que le modèle participatif en vigueur à l’école alternative puisse avoir un impact significatif sur l’implication parentale dans l’école régulière elle-même. C’est, à tout le moins, dans cet esprit convivial de partage, d’échange et d’appui mutuel que nous envisageons la possibilité de cohabiter avec les familles du secteur régulier de l’école Charles-Lemoyne.

b) Une implication maximale du milieu
« Le milieu de l'École Publique Alternative du Québec est d'abord un milieu humain formé des personnes qui cogèrent l'école. L'École Publique Alternative du Québec est aussi ancrée dans son milieu local et dans la société, elle constitue une communauté de vie et de recherche. »
Pointe-Saint-Charles a de tout temps été un terreau fertile pour le développement de ressources collectives. Ce quartier est en effet réputé pour être celui qui, au Canada, contient la plus forte concentration d’organismes communautaires : Clinique communautaire de Pointe-Saint-Charles (l’ancêtre des actuels CLSC), Clinique juridique de Pointe-Saint-Charles, Carrefour d’éducation populaire, Club populaire des consommateurs… Ces organismes, fondés au début des années ’70, sont toujours bien vivants et alimentés, dans bien des cas, par l’arrivée de nouvelles familles dans le quartier. Ainsi, ces dernières années, de nouvelles préoccupations ont vu le jour : on pense maintenant écologie urbaine, jardins collectifs, maison de naissance et, pourquoi pas, école alternative !
Ces organismes, comme l’école dont nous dressons actuellement les contours, ont dû prendre acte des transformations du milieu et s’adapter aux besoins de clientèles de plus en plus diversifiées. Une école ouverte sur son milieu, capable d’en extraire les richesses, une école qui intervient dans la vie du quartier, qui vit comme un membre à part entière du milieu : voilà ce qui semble s’inscrire naturellement dans la logique, dans l’historique des réalisations sociales dont Pointe-Saint-Charles peut s’enorgueillir.
Si Pointe-Saint-Charles a, parfois encore, les allures d’un village tissé serré dont les membres se saluent et se reconnaissent, se côtoient, s’invitent et se fréquentent assidûment, c’est en grande partie parce que des lieux de rassemblement et de débat ont été créés au fil des ans, qui ont permis ces rencontres inédites. Une école alternative à Pointe-Saint-Charles, c’est un autre lieu, une autre chance de voir se rapprocher dans l’âme des gens qui sont voisins dans l’espace. C’est aussi, à la base même du projet, une initiative citoyenne qui rassemble des familles du quartier, anciennes et nouvelles, désireuses de créer des solutions novatrices à des problèmes bien concrets d’inclusion, d’intégration sociale et de renouvellement de notre imagination collective en matière d’éducation.

c) Une implication maximale des enfants
« Une bonne part des apprentissages des élèves de l'École Publique Alternative du Québec naissent des projets des élèves. Les choix d'OBJETS sont donc fonction des projets et choisis par les élèves. Ainsi, les apprentissages ne sont plus uniquement le reflet de l'acquisition des notions d'un programme d'études puisque les élèves participent aux décisions portant sur le contenu de leurs apprentissages. »
Cette caractéristique des écoles alternatives, qui place l’enfant au cœur de ses apprentissages, semble un gage de réussite pour une école qui se veut pluriethnique et pluriculturelle. Les enfants, chacun à leur rythme et suivant leurs inclinations personnelles, auront la chance de connaître une variété d’expériences dont ils seront le moteur et dont ils tireront, à juste titre, la fierté du travail bien fait.
Ces écoles, réputées être des lieux chaleureux et propices au plein épanouissement de l’enfant, parce qu’elles offrent un encadrement personnalisé, parce qu’elles respectent profondément le rythme d’apprentissage de chaque enfant, parce qu’elles accordent la primauté à la qualité des relations interpersonnelles, et parce que chaque enfant côtoie quotidiennement plusieurs adultes qui ont des rapports respectueux et significatifs avec lui, ces écoles, donc, semblent particulièrement à même de participer à l’effort collectif qui vise à contrer la tendance au décrochage. Et ces écoles, pour les mêmes raisons, semblent particulièrement à même de nourrir les besoins d’enfants qui arrivent stimulés à l’école primaire, prêts à relever des défis, enthousiastes et confiants : pour eux, l’école alternative sera le lieu où s’épanouiront ces possibilités, où leur imagination aura les moyens de concrétiser en projets les idées qui y germeront.
L’école alternative, c’est un milieu rassurant et bienveillant, un milieu qui soigne et qui protège, mais c’est aussi une ouverture au monde, à la nouveauté et à l’expérimentation qui permet aux enfants de se dépasser et d’acquérir une confiance en eux-mêmes qui sera leur meilleure alliée dans la vie adulte.

Les incontournables

a) Le système de valeurs
Les grandes valeurs qui forment le ciment du réseau des écoles publiques alternatives sont les suivantes : respect, coopération, autonomie, responsabilité, engagement, démocratie et innovation. Nous souscrivons entièrement à ces valeurs maîtresses qui semblent incontournables quand il s’agit de mettre en place un système éducatif centré sur l’enfant, sur ses besoins, sur son rythme d’apprentissage, sur ses capacités personnelles.
À ce réseau de valeurs, nous ajouterions le plaisir puisque nous croyons fermement que sans plaisir, il n’y a pas d’apprentissage possible : il n’y a qu’un système de neurones qui s’agitent et se connectent sans conviction. Pour que le corps comprenne, il faut que l’âme s’active !
Dans cette perspective, tout projet, toute réflexion pédagogique, tout engagement que prendrait l’école envers la communauté et inversement, toute adhésion des parents au projet de l’école devrait être mesuré à l’aune de ce plaisir dont nous souhaitons qu’il soit le ferment de tout ce qui germera au sein de ce nouveau terreau. Nous voulons des enfants heureux ! Des parents qui s’emballent ! Un milieu qui y croit ! Et à la fin, un monde meilleur !

b) Les orientations pédagogiques
Nous souhaitons, pour cette école et pour la réussite du projet éducatif qui s’y développera, une pédagogie empreinte d’humanité. Concrètement, cela signifie :

Des relations humaines harmonieuses basées sur le respect des différences
L’objectif : Pour atteindre ce « respect des différences », on s’assurera que des enfants de milieux, d’âges et de sexes variés se fréquentent au quotidien dans des classes multiâges.
Les moyens : On mettra sur pied des classes multiâges dans lesquelles les enfants seront suivis par un même enseignant durant plusieurs années consécutives. Les petits de 4-5 ans seront ainsi accueillis dans une classe préparatoire ; les « moyens » seront regroupés dans la classe des 6-7-8 ans, et les 9, 10 et 11 ans, dans la classe des « grands ». Au besoin, selon les nécessités pédagogiques et les projets mis en branle par les élèves et leurs enseignants, ces classes pourront aussi se regrouper en grand groupe (ou « classe-école ») pour favoriser une réelle mixité, une réelle rencontre des différences.
Ces regroupements par tranches d’âges, tels qu’on les retrouve dans toutes les écoles alternatives du Québec, ont l’avantage de permettre des interactions fructueuses entre enfants, à la fois sur le plan des apprentissages formels et sur celui du développement socio-affectif. Les enfants, placés en contact quotidien avec des plus petits/des plus grands, développement habituellement des habiletés sociales particulières : sens de l’empathie, respect, ouverture à l’autre, confiance en soi-même aussi, dans le cas des grands qui sont régulièrement appelés à soutenir les plus petits dans leur parcours pédagogique.

Des relations humaines nombreuses pour permettre la connaissance de l’Autre
L’objectif : La connaissance de soi passant par la connaissance de l’autre, on s’assurera de multiplier les occasions de rencontres marquées par la plus grande différence possible.
Les moyens : Dans un premier temps, et comme cela se fait aussi dans l’ensemble du réseau des écoles alternatives du Québec, tous les membres de la famille seront invités à investir l’école : parents accompagnés de leurs plus jeunes enfants, grands-parents, oncles et tantes… tous ceux que le projet passionne et qui ont à cœur de vivre auprès des enfants l’expérience de la rencontre seront les bienvenus à l’école. Dans le cadre d’une école qui se veut à l’écoute des particularités d’un milieu fragile et souvent défavorisé, une attention particulière sera apportée aux familles monoparentales de manière à leur permettre de participer pleinement à la vie de l’école : système de parrainage entre familles, intégration de la famille élargie, partage des responsabilités entre deux ou plusieurs familles monoparentales, participation à des activités scolaires en dehors des heures normales de travail, etc. Plusieurs avenues novatrices seront explorées afin d’offrir à chaque famille la possibilité de s’investir dans la vie de l’école dans la mesure de ses possibilités et dans le respect des limites de chacun.
Parce que nous visons la mise sur pied d’une école qui soit véritablement à l’image de notre quartier, nous sommes convaincues que cette intégration des familles dans la vie de l’école, en plus d’être un gage de réussite des élèves comme maintes études sont venues le confirmer ces dernières années, permettra par ailleurs la rencontre de l’altérité : des familles issues d’une immigration récente, des anglophones de souche, des francophones de milieux socioéconomiques très diversifiés… Tout ce beau monde gagnera à se fréquenter sur une base régulière, dans le contexte très chaleureux d’une école qui a pour objectif premier de favoriser ces échanges et de faire en sorte que l’école soit un appendice de la vie familiale : entre la vie à l’école et la vie à la maison, entre la vie au parc et la vie en classe, entre se saluer entre voisins et se côtoyer entre les murs d’un établissement scolaire, la transition devrait se faire en douceur et permettre aux uns et aux autres d’apprendre à vivre ensemble.

Les enfants seront aussi appelés à fréquenter les lieux où, dans notre quartier, se vit déjà cette rencontre avec la différence : jardins communautaires, organismes qui œuvrent en alphabétisation ou auprès des personnes handicapées, centres d’hébergement pour personnes âgées, organismes qui accueillent les nouveaux arrivants et espaces investis par ces nouveaux arrivants (restaurants, petits commerces, etc.) : tous ces lieux gagneront à être découverts par les enfants de l’école, qui sauront aussi proposer des projets permettant d’approcher au plus près ces diverses réalités. Il s’agira en fait, par la multiplication des occasions de rencontre, de dépasser les murs de l’école pour que les enfants apprennent à découvrir et à s’investir dans leur milieu de vie.

Dans le contexte particulier de la mise sur pied d’une nouvelle entité scolaire dans le quartier, une attention toute particulière sera par ailleurs accordée aux relations avec les écoles existantes. Consciente des efforts entamés ces dernières années pour revitaliser les écoles primaires du quartier, consciente aussi de la nécessité de s’intégrer dans cette dynamique sans risquer d’en interrompre le mouvement, l’équipe-école devra avoir à cœur de proposer des projets conjoints, de s’investir dans ce qui se fait déjà, de compléter, si besoin est, l’offre de services déjà existante… Bref, de trouver sa place en toute délicatesse et en tout respect pour le travail déjà en cours dans notre milieu.
Nous demeurons convaincues que la nouvelle école alternative pourra devenir un outil de plus pour permettre aux familles du quartier de s’intéresser à la vie scolaire de leurs enfants et pour les inviter à y prendre activement part. Nous demeurons aussi convaincues que cette école saura stimuler des projets nouveaux (en éducation relative à l’environnement, notamment) et s’insérer tout naturellement dans ce qui se fait déjà (la chorale des trois écoles primaires, par exemple).
Dans tous les cas, il s’agira de protéger les acquis et d’encourager l’innovation, en s’assurant que le plus grand nombre possible d’enfants et la plus grande diversité possible de familles puissent profiter de l’expérience offerte par cette nouvelle entité scolaire.

Des relations humaines marquées par la confiance, le respect et la complicité
L’objectif : Les relations entre enfants et enseignants, entre parents et enseignants, entre enfants – toutes les relations humaines qui se tisseront au sein de l’école devront être empreintes de douceur et de respect; elles devront être fondées sur la complicité et le plaisir de vivre ensemble.
Les moyens : Dans la gestion des conflits, on privilégiera une approche marquée par l’écoute, la discussion, la concertation, la prise de parole franche mais respectueuse (notamment à travers la méthode axée sur la communication non violente, ou CNV, déjà en vigueur dans certaines écoles de la CSDM). Dans tous les cas, on privilégiera le dialogue, la réflexion concertée et ouverte entre parents, enseignants et enfants; dans tous les cas, l’enfant sera appelé à participer à l’élaboration de ce modèle éducatif qui le concerne au plus haut point. Un code de vie sera élaboré par tous ceux qui fréquentent l’école (parents, enfants, enseignants et membres du personnel), et devra être régulièrement révisé par les nouvelles cohortes d’élèves et de parents qui investiront l’école.

Des relations humaines fondées sur l’engagement et la participation à la vie démocratique
L’objectif : Une école alternative à Pointe-Saint-Charles, c’est nécessairement une école qui favorise l’engagement citoyen, l’altruisme, la pleine participation à la vie démocratique.
Les moyens : Au sein même de l’école, des conseils de classe seront mis sur pied dès les premières étapes de la scolarisation afin que les enfants participent de plein droit au processus démocratique; une assemblée mensuelle permettra aux parents, aux enfants et aux membres du personnel enseignant de discuter des projets, des choix, des défis qui se poseront à eux au quotidien; l’école, elle, sera gérée par un conseil d’administration formé de membres du personnel, d’enseignants, de parents et d’élèves. Des représentants de l’école participeront par ailleurs à la vie sociale et politique qui anime le quartier : assemblées générales d’organismes communautaires, tables de concertation dans le milieu de l’éducation, forums consultatifs… Tous ces lieux où des débats ont cours, où des idées novatrices peuvent germer, où des citoyens tentent de refaire le monde à leur image devront être investis par une école soucieuse d’être partie prenante d’un plus vaste projet collectif.

Des relations humaines qui privilégient le respect de l’intégrité psychologique de l’enfant
L’objectif : La préservation de l’intégrité psychologique de l’enfant sera au cœur des préoccupations des adultes qui s’impliqueront dans la vie de cette école.
Les moyens : En classe, une « pédagogie de la coopération » permettra à tous les enfants d’une même classe de participer à l’élaboration du contenu des cours (choix des thématiques, des projets) et de prendre des décisions concernant les moyens de parvenir à leurs fins (projets individuels ou collectifs, cours magistraux, expériences, ateliers…). De plus, le point de départ des apprentissages sera, le plus souvent, les productions des enfants eux-mêmes à partir desquelles, parce qu’elles sont déjà chargées d’émotions, on peut dégager des savoirs plus formels qui auront du sens pour l’enfant (apprentissage de l’orthographe, de la grammaire, des mathématiques…).
Par ailleurs, afin que l’enfant ressorte grandi de son parcours scolaire et parce que l’école alternative vise le développement intégral de l’enfant, le cheminement scolaire de l’enfant devra coller au plus près à son propre rythme d’apprentissage. Tout au long de ce parcours scolaire, il va de soi que la famille et l’enfant seront régulièrement tenus au courant de la progression des apprentissages et que l’enseignant veillera à suivre de près cette progression pour s’assurer que l’enfant donne sa pleine mesure. Par contre, les évaluations formelles de fin de cycle (2e et 4e années) seront suspendues, comme cela se fait aussi dans les écoles alternatives du Québec, pour permettre à l’équipe-école de bâtir elle-même son propre outil de suivi : cet outil, de même qu’une communication constante aussi bien avec l’enfant qu’avec la famille, garantiront que l’enfant acquiert toutes les compétences exigées par le ministère de l’Éducation, mais qu’il le fait à son rythme et suivant le développement de ses champs d’intérêt.
À la toute fin de son parcours primaire, soit à la fin de la 6e année, l’enfant sera néanmoins appelé à passer les examens ministériels exigés de l’ensemble des élèves québécois pour s’assurer qu’il a intégré l’ensemble de la matière du primaire. Cette façon de faire a, jusqu’à présent, permis de démontrer que les enfants issus du secteur alternatif réussissent aussi bien que les enfants du secteur régulier : au bout du compte, les apprentissages formels sont réalisés, à un autre rythme et d’une autre manière, certes, mais ils existent et les enfants de l’alternatif sont solidement équipés pour leur entrée au secondaire.

Des relations humaines structurantes
L’objectif : Pour faire en sorte que chaque enfant se développe dans les multiples facettes de sa personnalité, de très nombreuses et très variées expériences d’apprentissage seront proposées aux élèves dès la pré-maternelle.
Les moyens : Les enfants seront initiés à plusieurs activités manuelles qui leur permettront de développer des habiletés nouvelles : travail du bois, initiation au tricot et à la couture, travail de la terre, préparation et cuisson des aliments… Tous ces domaines seront explorés en collaboration avec des parents et des organismes du quartier qui œuvrent déjà dans ces domaines.

En outre, tout au long de leur parcours scolaire, les enfants seront mis en contact avec plusieurs formes d’expression artistique (musique, théâtre, arts visuels) qui, parce qu’elles sont des lieux d’expression et de créativité, et parce qu’elles permettent à l’enfant d’apprendre à se structurer dans le temps et dans l’espace, sont des sources d’apprentissage majeures.

Enfin pour permettre le plein développement de l’enfant, à l’école alternative de Pointe-Saint-Charles des efforts particuliers seront développés pour faire en sorte qu’une grande partie des activités et des projets pédagogiques permettent aux enfants d’être en contact avec la nature, avec la vie extérieure. Ces dernières années, plusieurs recherches ont en effet mis en relief le manque dont souffrent les enfants élevés en milieu urbain, qui sont de moins en moins en contact avec la nature . Ces recherches nous poussent à croire qu’en milieu défavorisé, et dans un contexte de forte immigration, il devient essentiel de trouver les manières de permettre aux enfants d’être régulièrement en contact avec la nature. La pédagogie alternative, avec tout ce qu’elle permet de souplesse, d’inventivité, de liberté laissée à l’enfant dans la découverte de ses moyens d’apprentissage, nous semble tout à fait apte à permettre l’intégration maximale du contact avec la nature dans le fonctionnement quotidien de l’école.
Ainsi, concrètement, une partie des apprentissages quotidiens et des projets initiés par les élèves se feront à l’extérieur des murs de l’école : dans la cour, au parc, dans la ruelle… Partout où fourmille la vie et où l’enfant peut expérimenter dans une démarche empirique qui sera, par la suite, partagée, retravaillée en classe, réutilisée dans l’acquisition d’apprentissages plus formels. Ici encore, la pédagogie alternative, parce qu’elle fait la belle part à la découverte par l’enfant lui-même de ses méthodes d’apprentissage et parce qu’elle vise le développement de l’autonomie, assurera que cette façon de se mettre en contact avec la vie extérieure prendra tout son sens et servira au mieux les intérêts de l’enfant.

Et pour que cette facette du projet de l’école s’insère harmonieusement dans la logique de la pédagogie alternative, nous souhaiterions favoriser l’embauche d’un(e) naturaliste qui pourrait orchestrer, de concert avec le corps enseignant, les parents et les élèves de l’école, tout ce volet. Il va de soi que nous suggérons, étant donné le cadre financier très serré imposé aux établissements scolaires que, dans un premier temps, et étant donné la taille réduite qu’aura probablement l’école au moment de son ouverture, le contact avec un(e) naturaliste se fasse via les fonds réservés à la formation des enseignant(e)s. Il serait aussi possible d’avoir recours à des fonds privés qui soutiennent financièrement le développement d’initiatives visant à mieux intégrer l’éducation relative à l’environnement en milieu scolaire. Il appartiendra aux parents et aux membres du personnel qui œuvreront dans cette école de trouver les moyens de financer ce poste qui pourrait s’avérer précieux quand il s’agira d’arrimer au mieux les nécessaires allers-retours que « vie en extérieur » et « apprentissages fondamentaux » exigeront. Il s’agit là d’un travail novateur, d’une formule pédagogique vivante qui passionnera assurément les élèves et leurs enseignants, mais qui bénéficiera grandement d’un soutien pédagogique qui viendra, en partie, des connaissances « terrain » que pourra fournir le(la) naturaliste.

En conclusion…

L’arrivée, souhaitée par de nombreuses familles, d’une école alternative à Pointe-Saint-Charles viendra, d’abord, combler un manque criant : aucune école de ce type n’existe dans tout le Sud-Ouest et plusieurs familles voyagent actuellement leurs enfants quotidiennement dans des écoles de ce type situées ailleurs à Montréal ou dans des commissions scolaires avoisinantes. Les très nombreux appels, courriels, offres de soutien, demandes d’information, etc. que nous recevons chaque semaine nous ont convaincues que la demande pour ce type de pédagogie est réelle et pressante. Il y a là un terreau fertile sur lequel Pointe-Saint-Charles et le Sud-Ouest peuvent construite un projet des plus stimulants : des parents impliqués dans le processus de scolarisation de leurs enfants, des parents intégrés à la vie de leur quartier, des familles qui s’investissent dans leur milieu, des familles qui croient à l’école publique, des familles qui veulent se côtoyer, apprendre à se connaître et à se découvrir dans toute la richesse de leurs différences.
Pointe-Saint-Charles a tout à gagner dans ce projet qui se veut rassembleur, complémentaire à ce qui se fait déjà dans les écoles du quartier, et qui saura s’intégrer doucement, progressivement, à mesure que grandira l’école et que grandiront nos enfants, dans la dynamique du milieu.
Pointe-Saint-Charles ne peut pas se permettre d’attendre encore 10, 15 ou 20 ans l’ouverture d’une école alternative puisque c’est, actuellement, toute une génération de jeunes familles ouvertes et engagées qui espèrent le démarrage de ce projet.
C’est donc avec confiance et espoir que nous vous remettons ce « texte fondateur », fruit de plus d’une année de réflexion entre membres fondateurs, acteurs du milieu, familles intéressées et intervenants du secteur alternatif. À tous ceux qui ont nourri notre réflexion, nous adressons de très sincères remerciements, et à ceux qui ont maintenant entre les mains le sort de cette école, nos très grands espoirs.